Dimanche, après le confort, l’effort. Il est temps de passer aux choses sérieuses et d’enfourcher nos biclous pour 60 kms dans la campagne saumuroise. En route, mauvaise troupe, les dégustations de vin n’attendent pas !
Dimanche avec Lucienne la Châtelaine
Dimanche, avec seulement quelques heures de sommeil depuis le début du week-end, notre motivation est bien évidemment au top. Le moral grimpe en flèche quand l’ouverture des volets révèle une pluie continue et un sol détrempé.
Les clients croisés dans le hall de l’hôtel nous regarde avec pitié mais je les ignore. J’ai un K-Way, rien ne peut m’arriver. En plus, nous avons des copains cyclistes, je compte sur eux pour me motiver/servir de GPS/mettre du son. Bon, il me manque juste un vélo mais ce n’est qu’un détail.
Nous évitons les gouttes d’eau jusqu’au théâtre où nous allons retirer nos enclumes bicyclettes. Et là, l’organisatrice d’hier, toute soulagée: « on a retrouvé le vélo vert, il était derrière un camion à l’autre bout de la ville !! ». Ok… Ils l’ont vraiment cherché tout hier soir, c’est…une bonne nouvelle ? Ludo fait des ronds sur son vélo tout neuf. Sale hipster.
Je sors assister au départ du 90 kms, histoire de voir d’autres gens souffrir sur une selle. Le speaker annonce environ 200 dingues, quasiment tous sur des vélos de compétition, maillot en laine, chambre à air autour du torse et vieux casque en cuir sur le crâne. A voir les cuissots sur la ligne de départ, je vois tout de suite que les bestiaux sont sur-entraînés. Nous n’aurions vraiment pas fait le poids dans ce peloton, la retraite stratégique sur le 60 km a été la meilleure option.
Ha, ça rigole parmi les participants de « Ferdinand la Rustine »
Ok, je les emmène où, les zozos derrière ?
Allez, c’est parti !
Les fous furieux s’élancent et nous prenons leur place. Je reste soigneusement à côté de mon vélo, pour des questions de préservation du postérieur. Ludo et Nico se font des blagues tandis que Margaux examine le ciel d’un œil dépité. Des photographes locaux passent dans les rangs, TF1 aussi. Et ouais, l’Anjou Vélo Vintage, c’est aussi médiatique que le tour de France ! Le speaker est ravi de nous apprendre que nous sommes environ 900 au départ, dont des Grand-Bi et une triplette de 1936 (les cyclistes ont presque le même âge que leur tandem, tant de cohérence, c’est beau).
Les fiers participants de la rando « Lucienne la Châtelaine ».
Montreuil-Bellay : il pleut, il pleut bergère
10h. 3…2…1 et c’est parti. Ou pas. Pour des questions de dignité, je fais l’impasse sur le démarrage, les premiers kilomètres en ville pour atterrir vers le 5ième kilomètre. En fait, nous allons nous téléporter directement au dernier ravito. Fin de la rando. C’était cool. Cœur sur toi, lecteur.
Bon, sachez seulement que j’ai découvert au moment de partir que le guidon du motobécane était beaucoup plus étroit que celui de mon VTT, avec tous les problèmes de direction que cela entraîne; que le dérailleur est bloqué sur le plus grand plateau (vous sentez venir la galère dans les côtes ?) et qu’il n’y pas de freins (vous sentez venir la galère dans les descentes, après les côtes ?). En bref, j’évite la crise de panique et ne tombe pas. L’honneur est sauf.
Les choses s’arrangent (un peu) dans la campagne : nous roulons par petits groupes, j’ai de la place autour de moi, presque pas de circulation sur la départementale, le parcours est super bien balisé avec des AVV (AVV= Anjou Vélo Vintage, faut suivre) bombés tous les 500 m sur le bitume. Voyant que je reprends forme humaine, Ludo se rapproche et entame la discussion. Nos potes sont devant. Nico a branché son enceinte et diffuse du rockabilly. La musique adoucit mes mœurs, jusque-là, tout va bien. Nous croisons un nombre impressionnant de cyclistes en perdition sur le bord de la route, réparant leur chambre à air dans les champs. Je comprends pourquoi le stand Rustine faisait le plein hier, c’est vraiment de la daube fragile, ces vieux vélos de route !
Il se met à pleuvoir.
L’univers se moque de moi, là, non ?
Ok, nous avons nos bérets mais la pluie gâche franchement la balade au milieu des champs. En plus, nous passons sur des chemins blancs : résultats nous avons de la boue sur les jambes et Ludo a le dos crépi (il n’a pas de garde-boue, hé hé hé). L’averse ne me dérange pas spécialement, après tout, j’ai accompagné l’Homme pendant 5 ans sur des enduros dans les pires conditions météos. Je suis all-weatherproof. J’enfile quand même mon k-way pour protéger mon sac photo, qui n’est pas étanche, lui, et c’est parti pour 20 km à la nage.
Margaux et Nico sont loin devant, je reste sagement avec Ludo. Je manque passer sous une voiture (pas de frein), j’arrive à passer les côtes mais mon genou croustille (pas de jambes) et mes converses font floc-floc (pas de bol). Premier arrêt à Montreuil-Bellay pour une pause sandwich bien méritée. Tout le monde se presse sous les arcades pour tenter d’être un peu moins humide. Deux guitaristes survoltés chantent du Brel à pleins poumons, avec une chorale de cyclistes. Il y a des dégustations de vin rouge mais je passe mon ticket. Le jus d’orange fera très bien l’affaire pour le moment. Déjà qu’à jeun, j’ai du mal, je ne vais pas me rajouter des difficultés.
Pitié, ne me faites pas remonter sur ce vélo..!
Le château ainsi que le cloître sont très beaux mais la pluie douche un peu mes envies touristiques. Margaux a pitié de moi et me prête son vélo pour la prochaine étape. Je pleure intérieurement à l’idée de remonter sur la selle. Mais qu’est-ce qui m’a pris de venir ?
Une côte à 18% nous cueille dès la sortie. Pas très fair-play tout ça…Ensuite, c’est le naufrage du Titanic. Il y a des côtes ! Et des descentes ! ça commence à m’énerver. Nos amis nous sèment assez rapidement et Ludo préfère les suivre avant de s’en prendre une. Mon amour du vélo touche au maximum. Le déjeuner devait se trouver à côté de Montreuil, dixit Margaux. FAUX, MENSONGE, FAUX ! C’est à l’abbaye de Fontevraud et c’est loin ! Dans une côte du terrain militaire (sympa les panneaux « tir d’armes de guerre, danger »…), j’en ai plein les bretelles et m’arrête. Le vélo de Margaux a beau avoir des freins, un dérailleur 2 vitesses fonctionnel et une selle plus confortable, j’ai juste envie de me rouler en boule dans un fossé et d’attendre qu’on me ramasse.
J’attends. On ne me ramasse pas. Même pas un chevreuil pour me tirer…
Je me résous à remonter sur l’engin de torture et à rallier l’abbaye. Notre groupe de Châtelains étant assez nombreux, il y a toujours quelqu’un à côté de moi pour me glisser un petit mot d’encouragement. Ludo m’attend juste avant l’entrée du domaine de l’abbaye. Son attention ne rachète pas le fait que la balade en deux roues non-motorisé est SON idée. Je ronchonne sous mon béret, j’ai faim, rien ne va.
Le ciel se dégage, je deale le contenu de mon panier repas avec Ludo et ma mine de bébé phoque noyé me fait gagner une bouteille d’Anjou Cola auprès de l’orga. Hé hé. Le village est vraiment joli, avec une placette centrale typique. Avec les cyclistes en tenue des années 50, les musiciens et les mamies Tipiak danseurs qui sautillent sur une ronde traditionnelle, nous nous croyons vraiment revenu un demi-siècle en arrière !
Le repas de midi, miam.Il n’y a pas d’âge pour un bon sandwich.
Souzay-Champigny, les grottes, quelles grottes ?
C’est pas tout ça, mais il faudrait songer à rentrer. Après un arrêt à l’atelier bricolage « – Allez, je vous échange ce truc contre un vélo plus maniable ? Non, vous êtes sûrs ? Vous n’aimez pas le vert ou quoi ? Vous pouvez au moins réparer le câble du dérailleur, sivouplé ? », je repars avec un biclou dont les vitesses sont bloquées sur le plus grand plateau. C’est déjà ça.
J’ai presque le sourire, le plus dur est derrière nous, les ravitos sont plus rapprochés et le soleil pointe enfin son nez ! La balade le long de la Loire devient enfin agréable.
Sauf quand les dieux du vélos se liguent contre toi.
Notre parcours rejoint celui du 30 kms Gaston Le Vigneron, ça fait soudain du monde sur les routes. Ce parcours porte bien son nom puisqu’il fait le tour de plusieurs caves avec la possibilité d’acheter des bouteilles sur places (du producteur au gosier du consommateur en 15min, ça, c’est du circuit court). Concentrés sur les nouveaux arrivants, nous ratons une bifurcation, le ravito et perdons Margaux et Nico, qui traverserons les grottes troglodytes de Champigny sans nous. Ce raccourci involontaire nous amène plus rapidement au dernier stop. Enfin, rapidement, c’est une façon de parler parce qu’il y a une longue montée à se farcir avant de pouvoir s’asseoir sur une pelouse près des vignes. Mon genou craque, je préfère monter la côte en courant, triathlon style.
Un pause s’impose, Ludo va grignoter une brioche au ravito et j’admire les cyclistes qui nous entourent. Le contingent britannique est déjà là, un verre de rouge à la main. Les gendarmes passent, morts de rire avec leur parasol défoncé sur leur guidon; un groupe de résistants, croix de la Libération, vieille carabine à l’épaule et GI à l’arrière s’installent sur la pelouse. Tout le monde rigole, déguste la cuvée des 100 vignerons. Avec le soleil au-dessus de nos bérets, c’est le moment le plus sympa de la balade (et je ne pédale pas, bonus).
Le meilleur moment de la journée.
Débarquement du 14 juin.
6 ans, 30 kms. Normal.
Ne vous fiez pas à leur apparence : ces trucs font mal.
Du pain, du vin, il ne manque plus que le boursin. Coucou les copains ! 🙂
Le meilleur accessoire vélo du monde.
Une fois nos amis arrivés et hydratés au jus de raisin, nous décidons de repartir pour les derniers 5 kms. Nico remet du rock, ce qui provoque des réactions sympa chez les autres cyclistes et les spectateurs : « Et, vous avez de la musique, vous ? Cool ! » ou un enfant: « T’as vu, les gens, ils ont la musique dans le vélo ». Une dernière boucle nous amène près du château où le panorama sur les toits de la ville et la Loire est superbe. Dans le tunnel qui redescend vers Saumur, un groupe de cyclistes se met carrément à lever les bras et à siffler en cœur sur la musique. Ludo met des tartes aux petits tape dans les mains des gamins qui trépignent à notre passage. Je maîtrise la descente par miracle, sans frein et sans mettre les pieds pour ralentir. Le théâtre se profile, nous sommes arrivés ! Merci, merci, merci !
Le team LEO vient nous accueillir. Ils ont été tellement gentils et chaleureux pendant ces deux jours que je n’ose pas leur dire que le motobécane vert était à brûler. Je plains la prochaine qui posera son postérieur sur cette machine diabolique… Dernière surprise, ils nous remettent des gourdes au design vintage et des terrines ! Ludo est aux anges : de la nourriture ! Isabelle Montanier, la directrice de LEO, vient discuter et nous la remercions pour la bonne gestion de l’évènement, le balisage du parcours impeccable et la bonne ambiance générale. Nous apprenons que nous étions environ 3 330 amateurs de vintage à braver la météo ce dimanche. Une belle réussite ! Je n’apprécie pas le vélo de route (doux euphémisme) mais le cadre et les nombreuses pistes cyclables le long du fleuve donnent vraiment envie d’explorer la région.
Quelques chiffres:
Distance : 60 km
Dénivelé : 344 m
Vitesse moyenne : 15 km/h
Temps : environ 8h (avec les pauses)
La balance affiche 1,5 kg de perdu chacun, malgré les ravitaillements et les bouteilles d’eau bues, d’où le gros coup de fatigue le soir en rentrant. C’est physique, le pédalage, quand même !
Merci pour le compte-rendu hilarant et les photos!
Ha ha, merci !
C’est vrai que c’était assez épique !
Pour ceux qui aiment les vieux vélos (et savent en faire, pas comme moi), c’est un événement super sympa 😉